A Genève comme ailleurs, choisir un logiciel n’est pas qu’une affaire technique

ÉDITORIAL. Le canton fait preuve d’un volontarisme qui détonne par rapport au reste du pays. La décision des autorités de renoncer en partie aux services de Microsoft à l’école souligne l’importance qu’accorde désormais le politique à cet enjeu primordialLe canton de Genève a toujours été pionnier dans son approche des questions liées à la numérisation. Sa volonté, dès le début des années 2000, de proposer un système de vote électronique à ses citoyens en est probablement la démonstration la plus emblématique. La culture des logiciels libres au sein de l’école en témoigne aussi. Mais cette dimension a pris une ampleur encore plus importante avec l’introduction dans la Constitution cantonale, en juin 2023, d’un droit à l’intégrité numérique.Acceptée à plus de 94% par la population genevoise, cette nouvelle disposition a poussé le Conseil d’Etat à se doter d’un Département des institutions et du numérique. Une première en Suisse, qui envoie un signal clair: les nouvelles technologies de l’information requièrent une politique publique à part entière. La Confédération ne s’en est pas encore inspirée.Cette modification de la Constitution genevoise s’est faite avec le concours des autorités, notamment du Conseil d’Etat, qui s’est impliqué dans l’élaboration du texte. A Neuchâtel, où une proposition similaire a été votée par le parlement, le gouvernement a fait le choix de l’opposition. Les Neuchâtelois voteront sur le sujet le 24 novembre. ### Créer les conditions de l’alternative Genève se démarque donc bel et bien sur ces questions désormais fondamentales. La décision du Département de l’instruction publique révélée par _Le Temps_ de renoncer, en partie, aux services de Microsoft au sein des établissements scolaires doit être replacée dans ce contexte. Elle démontre que ces choix de logiciels ne sont pas qu’une affaire technique et pratique. L’adoption d’un service numérique, quel qu’il soit, est éminemment politique. Le fait que cela concerne des enfants rend bien entendu le sujet encore plus sensible. Il faut donc saluer le courage du gouvernement genevois, qui n’hésite pas à tenter une approche différente. Lire aussi: Protection des données: les élèves genevois n’ont (presque) plus accès aux logiciels de Microsoft Il ne s’agit cependant que d’un point d’étape sur une route encore très longue. Les autorités continuent d’être pieds et poings liés à des géants de la tech dans bien des domaines stratégiques. Il faudra donc aller encore plus loin, pour créer les conditions qui permettent l’émergence de véritables alternatives. Souvent moqué à Berne pour ses «genevoiseries», le canton semble toutefois être sur la bonne voie et la Confédération serait bien inspirée de lui demander quelques conseils. Car à l’échelle de la Suisse, la prise de conscience n’a pas encore eu lieu. Lire aussi: Comment mieux gérer ses mots de passe sur son téléphone: notre guide pratique

A Genève comme ailleurs, choisir un logiciel n’est pas qu’une affaire technique

ÉDITORIAL. Le canton fait preuve d’un volontarisme qui détonne par rapport au reste du pays. La décision des autorités de renoncer en partie aux services de Microsoft à l’école souligne l’importance qu’accorde désormais le politique à cet enjeu primordial

Le canton de Genève a toujours été pionnier dans son approche des questions liées à la numérisation. Sa volonté, dès le début des années 2000, de proposer un système de vote électronique à ses citoyens en est probablement la démonstration la plus emblématique. La culture des logiciels libres au sein de l’école en témoigne aussi. Mais cette dimension a pris une ampleur encore plus importante avec l’introduction dans la Constitution cantonale, en juin 2023, d’un droit à l’intégrité numérique.

Acceptée à plus de 94% par la population genevoise, cette nouvelle disposition a poussé le Conseil d’Etat à se doter d’un Département des institutions et du numérique. Une première en Suisse, qui envoie un signal clair: les nouvelles technologies de l’information requièrent une politique publique à part entière. La Confédération ne s’en est pas encore inspirée.Cette modification de la Constitution genevoise s’est faite avec le concours des autorités, notamment du Conseil d’Etat, qui s’est impliqué dans l’élaboration du texte. A Neuchâtel, où une proposition similaire a été votée par le parlement, le gouvernement a fait le choix de l’opposition. Les Neuchâtelois voteront sur le sujet le 24 novembre. ### Créer les conditions de l’alternative Genève se démarque donc bel et bien sur ces questions désormais fondamentales. La décision du Département de l’instruction publique révélée par _Le Temps_ de renoncer, en partie, aux services de Microsoft au sein des établissements scolaires doit être replacée dans ce contexte. Elle démontre que ces choix de logiciels ne sont pas qu’une affaire technique et pratique. L’adoption d’un service numérique, quel qu’il soit, est éminemment politique. Le fait que cela concerne des enfants rend bien entendu le sujet encore plus sensible. Il faut donc saluer le courage du gouvernement genevois, qui n’hésite pas à tenter une approche différente.

Lire aussi: Protection des données: les élèves genevois n’ont (presque) plus accès aux logiciels de Microsoft
Il ne s’agit cependant que d’un point d’étape sur une route encore très longue. Les autorités continuent d’être pieds et poings liés à des géants de la tech dans bien des domaines stratégiques. Il faudra donc aller encore plus loin, pour créer les conditions qui permettent l’émergence de véritables alternatives. Souvent moqué à Berne pour ses «genevoiseries», le canton semble toutefois être sur la bonne voie et la Confédération serait bien inspirée de lui demander quelques conseils. Car à l’échelle de la Suisse, la prise de conscience n’a pas encore eu lieu.
Lire aussi: Comment mieux gérer ses mots de passe sur son téléphone: notre guide pratique